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17 novembre 2010

La carte et le territoire de Michel Houellebecq, Prix Goncourt 2010

carteetterritoire1ère partie : histoire de Jed, artiste peintre et photographe, taciturne (voire autiste) qui décide de faire le portrait de Houellebecq, écrivain en vogue. Style alerte, lecture facile souvent drôle dans la description du milieu artistique.

2ème partie : plus classique, accorde une large place à la relation filiale, aux ambitions de jeunesse, aux idéaux sociaux, avec encore des passages assez désopilants sur le monde du « bling-bling »

3ème partie : très différente : un polar façon Simenon avec le meurtre très hard de Houellebecq (style Jonquet) avec un Jed très en retrait, témoin immobile, préférant de plus en plus la « carte », la représentation, au « territoire », le réel. Ce qui s’affirme dans l’épilogue avec un Jed vieillissant, coupé du monde.

Bien écrit, bien structuré, style classique, d’une lecture facile ; des pastiches réussis , une ironie décapante.

Jubilatoire mais très pessimiste et très égocentrique.

         

Nicole L.

*

Michel Houellebecq se livre à un fascinant jeu de miroirs : Jed Martin lui ressemble ; il se met lui-même en scène  très ironiquement sous la forme d’un personnage qui écrit sur l’artiste ;  il n’hésite pas à s’assassiner, dans une sorte de parodie du dernier Fred Vargas.

Ces jeux de miroirs ressemble à des fausses pistes, si on veut lire l’œuvre comme un roman à clefs (même si le romancier nous y invite avec les allusions à F. Pinault, J.P. Pernaut…) ; mais l’écrivain ne se réduit pas à  sa représentation en tant que personnage.

Le livre est à la fois une réflexion sur l’Histoire et la condition humaine (Le roman s’achève dans le futur.), comme le dit Bruno Blanckeman, professeur de littérature française des XXe  et XXIe siècles à l’Université de Paris III : « 

La Carte

et le Territoire capte l’anxiété du temps, en l’insérant dans une vision de l’Histoire qui va de l’industrialisation jusqu’au milieu du XXIe  siècle. C’est une façon de penser où nous en sommes et vers quoi nous allons, en l’intégrant à long terme. »

Sylvie L.

*

Qu’est-ce qui est le plus signifiant : la carte, qui est déjà en soi représentation,- et de plus cadrée subjectivement par l’artiste photographe Jed Martin- ou le territoire dans sa réalité ? C’est donc une réflexion sur le travail de l’artiste qui m’a intéressée dans ce roman où, par un très habile jeu de miroirs, l’écrivain Michel Houellebecq se projette dans son double romanesque qui, lui-même n’est pas sans se refléter dans le personnage de Jed Martin qui lui-même peindra un jour un portrait de Houellebecq…

Que signifie le fait d’être un artiste ? Jed dit qu’ « à ses yeux, c’était avant tout être quelqu’un de soumis. Soumis à des messages mystérieux…Ces messages pouvant impliquer de détruire une œuvre ; pour s’engager dans une direction radicalement nouvelle, ou même parfois sans direction du tout… C’est en cela, et en cela seulement, que la condition d’artiste pourrait quelquefois être qualifiée de difficile… » Réflexion sur le travail de l’artiste : « On peut travailler en solitaire pendant des années, c’est même la seule manière de travailler à vrai dire ; vient toujours un moment où l’on éprouve le besoin de montrer son travail  au monde, moins pour recueillir son jugement que pour se rassurer soi-même sur l’existence de ce travail. » L’artiste doit aussi faire face à l’incompréhension du public : « C’est difficile de faire accepter une évolution artistique aussi radicale que la tienne. Et encore, je crois que c’est dans les arts plastiques qu’on est le plus favorisés. En littérature, en musique, c’est carrément impossible de changer de direction, on est certain de se faire lyncher. D’un autre côté, si tu fais toujours la même chose, on t’accusera de te répéter, d’être sur le déclin, mais si tu changes, on t’accuse d’être un touche à tout incohérent. »

Humour et sarcasmes prévisibles à chaque fois que Jed Martin rencontre ses contemporains dans une société très médiatisée : Teresa Cremisi, Frédéric Beigbeder, J.P. Pernaut, François Pinault…et Michel Houellebecq «  un solitaire à fortes tendances misanthropes ». Société de consommation soumise au dieu  Argent où des investisseurs milliardaires dominent depuis longtemps le marché de l’art. Le projet n’est pas de décrire notre société mais « un fragment constitué » de cette société comme l’expliquerait G. Pérec.

Dans la dernière partie du roman (peut-être un hommage à Thierry Jonquet décédé en 2009), le corps lacéré du personnage Houellebecq, victime d’un psychopathe, est dispersé en lambeaux si bien qu’il ne ressemble plus qu’à « un puzzle informe », à moins qu’on n’y voie une œuvre du peintre expressionniste Jackson Pollock ! La dernière œuvre de Jed est aussi une œuvre de désolation où tout se décompose « s’effrite et se dissocie » ; de même, dans quelques générations les allusions de l’écrivain à des contemporains si médiatisés aujourd’hui ne seront plus comprises ; il y aurait donc à voir ici « une méditation nostalgique… sur le caractère périssable et transitoire de toute industrie humaine ».

Michèle M.

*

Houellebecq  a toujours l’art et la manière de faire une bonne critique de notre société et d’aborder, remarquablement, le rôle de l’art puis la place de la mort dans cette société grâce à son style fluide et agréable.

Isabelle G.

*

La carte et le territoire, Michel Houellebecq, Flammarion, 2010. 428 p.

Crédit photo : Electre.

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